L’étrange destin de Katherine Carr, un livre de Thomas H. Cook

« Il y a sept ans le corps de Teddy, le jeune fils de l’écrivain George Gates, a été repêché dans la rivière. On n’a jamais retrouvé son assassin. Depuis, George écrit pour son journal local. Quand il découvre qu’il existe un lien secret entre le meurtre de son petit garçon et l’étrange poétesse Katherine Carr, disparue mystérieusement depuis vingt ans, George sort de sa torpeur… »

Mes premiers mots après avoir refermé ce livre: je n’ai rien compris. Ma sœur à côté de moi s’est marrée comme une baleine. J’ai lu la grosse partie de ce livre avec elle, affalée sur son lit, ce qui fait que mon quotient d’attention était très (très) bas! Mais L’étrange destin de Katherine Carr reste une bonne lecture malgré ce détail.

Rarement un personnage ne m’a fait autant de peine. George Gates a vécu le pire du pire : son petit garçon a été enlevé et assassiné. Et le coupable court toujours. George porte sur ses épaules une culpabilité immense: celle de ne pas avoir été cherché son fils à la descente du bus. Il entend constamment la voix de Teddy –son garçon- qui lui reproche de l’avoir abandonné. Ce qui donne lieu à des passages très émouvants, voire difficiles à lire si on est un peu sensible (comme moi). Surtout lorsque George imagine les horreurs que son petit a pu subir avant de mourir. Soyons honnêtes, j’ai eu envie de pleurer une bonne vingtaine de fois.  Thomas H. Cook a vraiment une superbe écriture, c’est indéniable. Toute la souffrance de George, sa détresse et sa colère sont retranscrites avec une absolue finesse et beaucoup de poésie. C’est mon premier roman de cet auteur, et je suis épatée de voir qu’il a réussi à nous éviter des scènes de pathos (qui m’auraient aussi fait pleurer cela dit). Gates porte constamment le souvenir de son Teddy, et ça me fait mal au cœur pour lui.

George, ancien reportage de voyages, ne peut s’empêcher de comparer ce qu’il voit avec ce qu’il a pu voir lors de ses périples. Et j’ai beaucoup apprécié ces moments d’évasion, qui lui permettent d’échapper pendant un instant à l’absence de son fils. Sa relation avec Alice, 12 ans et atteinte de la progéria (c’est une maladie qui accélère le vieillissement) est spéciale. Gates doit être la seule personne qui ne la prend pas pour une bête de foire, et qui veut réellement passer du temps avec elle. A eux deux, ils vont tenter de résoudre le mystère Katherine Carr. Il est clair qu’Alice est quelqu’un d’extrêmement courageux, et qui malgré sa situation, ne se plaint jamais. Les liens qu’elle a avec George sont assez forts, bien que sans effusion de sentiments, de larmes ou de gros câlins entre eux. C’est de la compassion et du respect vis-à-vis de leur tragédie respective. Je les aime bien tous les deux. Les moments qu’ils passent ensemble sont mes préférés. Quant à Katherine, écrivaine et poétesse, j’ai eu du mal à me faire une opinion sur elle. Gates et Alice cherchent à démêler le vrai du faux de son récit. Récit qui m’a un peu lassée d’ailleurs, puisque le lecteur lit les écrits de Katerine en même temps que les deux personnages.

C’est au niveau de l’intrigue que ça a légèrement coincé. J’ai trouvé l’histoire de Katherine triste, certes, mais assez longue à se mettre en place. Le fait qu’il n’y ait pas vraiment d’enquête –George et Alice s’en tiennent à la lecture des écrits de Katherine et à la visite de certains lieux- m’a un peu gênée, et je pense que c’est en partie pour ça que j’ai eu du mal à rentrer dedans (ça et aussi le fait que ma sœur n’a pas arrêté de se foutre de la gueule des candidats de The Voice, essayez donc de lire quand vous rigolez toutes les 30 secondes). L’auteur sème constamment le doute : Katherine a-t-elle bel et bien disparu? George a-t-il aperçu quelque chose le jour où Teddy a été enlevé? Je me suis retrouvée perdue dans un dédale de questions. Et il n’y a eu que peu de réponses à mon goût. Je pensais vraiment trouver un lien fort entre la disparition de Carr et la mort de Teddy, et puis je n’ai vu qu’un maigre et vague rapport. D’où mes premiers mots après cette lecture: je ne suis pas sûre à 100% d’avoir tout compris. Je le dis donc, le meilleur du livre réside dans les personnages, et leurs émotions.

J’ai été plus que séduite par l’écriture de Thomas H. Cook. C’est clair que ce ne sera pas ma dernière lecture de l’auteur. Il y a un passage que j’ai envie de partager avec vous, et qui a brisé mon cœur en mille morceaux (à la page 31) :

« Tout comme Faust qui avait vendu son âme au diable, j’avais remis la mienne à Dieu, ou à la Providence, ou à n’importe quoi dès lors que ça avait le pouvoir d’intercéder pour mon fils. Ça pouvait bien avoir une tête d’éléphant sur un corps d’homme gras, comme Ganesh, le fils de Shiva, peut m’importait. Je me serais prosterné devant Baal, quelle que fût sa forme, agenouillé devant n’importe quel veau d’or. J’aurais allumé tous les cierges de la cathédrale Saint Patrick, empilé autant de paniers de riz qu’il l’aurait fallu sur les marches des pagodes, marché jusqu’à la Grande Mosquée de Samarra en me flagellant le dos jusqu’au sang, pour que soit exaucée cette unique prière: ramenez-le-moi sain et sauf. »

En résumé :

Un beau livre qui traite d’une perte insurmontable, de la culpabilité et de la souffrance qui va avec. L’intrigue semble être reléguée au second plan, mais ce n’est pas plus mal, parce qu’on aurait pu passer à côté d’une belle écriture.

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